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Troisième lettre ouverte au Président Macron : Prière de cesser vos lectures dans le dictionnaire du colonialisme

Monsieur le Président,

Une fois de plus, je vous remercie et vous assure de ma gratitude car il est indubitable que votre future troisième visite [*] à Beyrouth en l’espace de quatre mois témoigne de votre intérêt exceptionnel pour le Liban. (The third visit in December is delayed since Macron tested positive to Covid-19)

D’autant plus que, ces derniers jours, les tensions sociale et politique en France ont atteint des niveaux élevés rarement rencontrés, les défis actuels se posant avec une telle acuité qu’ils laissent présager des expériences plus dures encore que celles vécues en 1968. Ou bien avant, à l’époque charnière de l’indépendance algérienne et de la défaite française devant celle-ci et en (Indochine).

En effet, aujourd’hui la lutte sociopolitique visant à sauver les acquis sociaux de l’époque gaulliste qui ont fait de la France le phare et l’exemple à suivre en matière de démocratie et de protection sociale, se heurte à la loi relative à la « sécurité globale ».

Une loi vue par une majorité de Français comme une destruction globale des fondements des libertés publiques et des droits individuels consacrés par les constitutions françaises successives depuis le tremblement de terre de 1789 (La Revolution).

L’argument des opposants à cette loi est qu’elle démolit, ne serait-ce qu’en théorie, l’un des piliers de la démocratie française, à savoir la « transparence » qui donne de la légitimité aussi bien aux mesures restrictives prises par les pouvoirs publics en matière de sécurité collective, qu’aux décisions des autorités relevant du Pouvoir judiciaire garant des principes de liberté et d’égalité inclus dans la triade de l’architecture républicaine.

Partant de ce constat, vous serez probablement surpris que je vous dise, bien que vous le sachiez déjà, une vérité qui fait que, nous au Liban et vous en France, nous sommes confrontés à des horreurs qui s’accumulent chez nous à cause de notre échec à construire une cohésion sociale ; lesquelles horreurs, toutes proportions gardées, risquent de s’accumuler chez vous pour cette même raison.

Si nous en sommes là c’est à cause de notre répartition dans des pénitenciers confessionnels et doctrinaires, l’appartenance à ces pénitenciers ayant désormais dépassé l’appartenance à la société nationale une et unifiée, d’où son effondrement et notre dégringolade dans le labyrinthe de l’échec menant à notre destruction globale.

Des pénitenciers confessionnels qui ont fini par dominer le système politique, puis transformer l’État en ce que vous savez, Monsieur le Président, vous qui êtes devenu par la toute puissance du maître de la Maison Blanche le superviseur de la destinée prescrite pour le Liban.

En France, vous ne souffrez pas de cette maladie incurable dont nous souffrons, j’entends par là les maux des pénitenciers confessionnels, mais vous souffrez d’autres maux qui peuvent vous mener à égarer votre boussole, ne serait-ce que le système du néolibéralisme auquel vous avez adhéré et qui pourrait vous mener à dépouiller votre société de ce qui a fait sa force et son unit: l’agonie ou la disparition de partis séculaires, l’affaiblissement de la résistance de la plupart des syndicats et la fragilisation de l’institution familiale qui est la composante fondamentale de toute société.

Quant à nous, c’est la France qui a grandement participé à l’élaboration de notre système politique, depuis que le comte Robert de Caix de Saint-Aymour a usé de son scalpel pour tailler dans la géographie levantine cette très belle carte de l’entité libanaise républicaine.

Pour plus de clarté, permettez que je vous rappelle une vérité de l’époque en citant, mot pour mot, un extrait du rapport intitulé « L’IMBROGLIO SYRIEN » et rédigé par le diplomate et écrivain français Paul Bonardi, assistant de M. Robert de Caix, émissaire français au levant dans l’entre-deux-guerres, délégué à la Commission permanente des Mandats de la SDN et secrétaire général du général Henri Gouraud, le Haut-Commissaire de la France au Levant de 1919 à 1923 :


« Robert de Caix, esprit subtil et délié mais trop enclin à faire des expériences sur les corps sociaux, conçut une organisation qui parut d’abord, et paraît encore à certains Français et aux Maronites, (secte Chrétienne) assez adroite.

Il bâtit le long de la Méditerranée un rempart inébranlable, ou prétendu tel, aux assauts du Panarabisme.
Mais il donna au Liban des terres qui appartenaient à l’État de Damas.

Dans l’État Libanais chrétien, il enferma des musulmans, des ennemis, et il en enferma tant que leur chiffre faillit passer en importance celui des Maronites.

Il suscita ainsi un irrédentisme propice à toutes les effervescences.
Après la lune de miel apparaissait au ciel des épousailles la lune rousse…

Les Libanais du moins étaient satisfaits. Ils offrirent à M. Robert de Caix de donner son nom à une rue de Beyrouth.

 Mon nom à une rue, dit M. Robert de Caix. Donnez-le plutôt à une impasse ! »


Un rapport de 155 pages qui n’aurait été tiré qu’en 42 exemplaires, d’autant plus important qu’il a été publié en 1927, c’est-à-dire un an après l’élaboration de la Constitution libanaise sous la supervision du Haut-Commissaire Henry de Jouvenel, lequel l’a délibérément minée par l‘article 95 connu sous le nom de « l’article confessionnel », poursuivant en cela le travail de découpes de M. Robert de Caix sur des Levantins vus tels des cobayes dans ses « expériences sur les corps sociaux » ! (Henry de Jouvenel, was a Zionist)

Monsieur le Président,

Vu la mission qui vous a été confiée pour le Liban, je ne vous imagine pas ignorer ces faits historiques, même si votre principale spécialité porte sur le secteur bancaire et les salles de bourse où le tumulte et les clameurs servent à faire passer des décisions prises ailleurs, comme nous l’explique le défunt expert, Eustace Mullins dans son célèbre ouvrage intitulé « Les secrets de la Réserve fédérale ».

Un ouvrage des plus remarquables, interdit d’édition et de parution par les puissances occultes pendant un quart de siècle environ.

Puissiez-vous, Monsieur le président, ne pas voir en l’auteur de ces lignes un obsédé par ladite théorie du complot. Citer cet ouvrage de M. Mullins m’amène juste à vous poser la question de savoir s’il ne serait pas opportun que vous prêtiez attention au fait que la Banque de New York, qui détient à elle seule la moitié des billets verts émis par la Réserve fédérale, s’est subrepticement infiltrée dans le système bancaire libanais et en est devenue le plus gros contributeur en plein effondrement financier et économique au Liban.

Une question éventuellement dérangeante, vu que j’ignore si ce sujet vous a été exposé par la junte politico-financière qualifiée de corrompue d’emblée et à juste titre par votre Excellence.

Quoi qu’il en soit, votre intérêt manifeste pour ce qui se dit dans les cercles civils libanais fait que j’en profite pour vous dire que la « société civile » c’est nous !

Nous qui avons été dépouillés par les banques avec la complicité du gouverneur de la Banque du Liban, lequel a remporté les plus grands prix internationaux décernés par les cercles financiers occidentaux.

Quant au cercle des banquiers criminels qui se prosternent avec révérence et déférence devant vous, pourquoi n’avoir rien fait pour qu’ils soient au moins traités comme la justice française traite aujourd’hui votre prédécesseur, le Président Nicolas Sarkozy, jugé pour corruption et contre lequel le parquet national financier a requis quatre ans de prison dont deux avec sursis ?

Il ne suffit pas de parler de corruption et de corrompus pour s’abstenir d’une quelconque forme de condamnation des seigneurs des banques, notamment ceux qui ont volé nos dépôts bancaires avant de les transférer illégalement vers les banques des États-Unis, de Grande-Bretagne, de France et de Suisse.

Parler des « corrompus libanais » signifie que vous possédez suffisamment d’informations sur le sujet.

C’est pourquoi nous nous sommes attendus à ce que vous procédiez au gel de leurs avoirs dans les banques françaises.

Je veux parler des avoirs de ceux qui ont détruit et appauvri les familles libanaises, d’un seul coup, par l’une des plus horribles arnaques que le monde ait connue.

Une arnaque financière complémentaire du crime ayant réussi à faire exploser le port de Beyrouth et une partie de notre capitale par une sorte d’arme de destruction massive ; le champignon de fumées observé ayant révélé tous les non-dits sur cette affaire. (An electromagnetic pulse bomb that only superpowers have)

Une fois de plus, Monsieur le Président, puissiez-vous ne pas me prêter les intentions d’un complotiste, mais une question s’impose d’elle-même, vu que nous attendons toujours les images satellites du théâtre de l’explosion du port de Beyrouth et nous espérons qu’au final vous ne nous décevrez pas.

À ce propos, un reportage d’un collègue journaliste connu pour son sérieux, M. Paul Khalifé, nous a appris qu’une source française bien informée a déclaré que le satellite était verrouillé lors de l’explosion.

C’est quand même bizarre ces satellites qui font la sieste et dorment d’un profond sommeil à chaque fois qu’Israël procède à une explosion.

Ainsi, le 7 juin 1981 et tandis que l’Irak de Saddam Hussein menait sa « guerre sacrée » contre l’Iran, avec le ferme soutien de la France, des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de l’écrasante majorité des Pays arabes, les avions de combat israéliens sont allés bombarder le réacteur nucléaire « Tamouz » jusqu’à le détruire complètement.

Un réacteur construit par la France suite au fameux accord entre Saddam Hussein et son ami « personnel » Jacques Chirac, Premier ministre de la France sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing.

Ce jour-là, ni les AWACS américains qui survolaient les eaux du Golfe dans le cadre d’un accord entre les États-Unis et l’Arabie saoudite, ni les Saoudiens, ni les alliés occidentaux n’ont songé à informer les Irakiens sur les préparatifs de l’aviation militaire israélienne. Tous leurs radars et satellites faisaient la sieste.

De même, aucun des pays de l’OTAN n’a présenté d’images satellites du bombardement ayant frappé dans la matinée du 14 février 2005 le cortège du Premier ministre libanais, Rafic Hariri, lui aussi un ami « personnel » de Jacques Chirac devenu Président de la République française, lequel n’a rien pu faire en dépit de son amitié et de sa profonde tristesse. Cette fois, tous les satellites faisaient la grasse matinée.

Et il paraît que le 4 août 2020, tous les satellites de la France, des États-Unis et de Grande-Bretagne avaient été frappés par un coup de soleil, d’où leur sieste prolongée au-delà de 18h.

De prétendues siestes pour couvrir le crime de l’explosion provoquée du port de Beyrouth, comme le Président Donald Trump avait commencé par le reconnaître.

Ce qui fait qu’il n’y a toujours pas d’images satellites pour ne pas révéler le rôle de l’enfant gâté : Israël.

Monsieur le Président,

Si vous vous abstenez d’aider les Libanais et en particulier les civils ayant été victimes du vol caractérisé des banques, et si vous vous abstenez d’aider le Liban en révélant la vérité sur ce qui s’est passé lors de l’explosion du port de Beyrouth, comment comptez-vous nous aider ?

Une question très simple, posée par une personne simple s’étant retrouvée du jour au lendemain dans le cortège des « nouveaux pauvres ».

Tout ce qu’elle veut savoir c’est la vérité, pour qu’à sa lumière elle sache comment récupérer ses maigres économies au même titre que ses frères et sœurs en citoyenneté.

Il n’est pas question que l’auteur de ces lignes soit moins courageux que l’enfant du sud libanais, Hussein al-Chartouni, lequel s’est moqué des pluies de balles israéliennes lorsqu’il est allé récupérer sa poule qui s’était échappée vers la bande frontalière entre le Liban et Israël. Donc, nous ne nous tairons pas.

Monsieur le Président,

Vous auriez dû prendre en considération ces questions lorsque vous avez co-présidé au début de ce mois de décembre la « Conférence internationale en soutien à la population libanaise ».

Abstraction faite de la suspicion qu’un tel intitulé nous inspire en tant que citoyens libanais originaires et propriétaires de notre pays, certains points de votre approche de la crise libanaise méritent attention.

En effet, par une ironie du sort, vous faites campagne contre la corruption avec l’assentiment de tous les corrompus et, en même temps, vous évitez d’évoquer la responsabilité du système libanais en tant que système ségrégationniste tel qu’il a été conçu par MM. Robert de Caix et Henry de Jouvenel.

Or, le système de l’apartheid est maudit en Occident depuis que le géant africain, Nelson Mandela, a réussi à le renverser.

Pourquoi restez-vous silencieux sur l’apartheid au Liban ? Pourquoi vous contentez-vous de nous parler de votre souci pour ce que vous estimez représenter notre société civile alors que nombre de ses organisations sont ouvertement financées par l’étranger, comme l’a publiquement déclaré David Hale, le secrétaire d’État adjoint américain pour les Affaires politiques ?

Un deuxième point qui mérite attention concerne votre étonnante méfiance des Libanais de souche turkmène et votre inquiétude quant à leur éventuelle adoption de la nationalité turque, ce qui pourrait mener à la création d’une nouvelle minorité susceptible d’être manipulée par celui qui jouerait à faire mine de la protéger.

Or, il ne faudrait pas oublier que la notion de minorités et le refrain des interventions pour la protection des minorités ont été introduits par les colonialistes français et britanniques.

Dommage qu’un membre de votre administration suffisamment versé dans ces questions ne vous ait pas informé sur cette politique qui a justifié vos ingérences au nom de la protection des minorités pour ensuite les abandonner, car les exemples sont pléthores.

Parmi ces exemples, permettez que je vous informe d’un entretien accordé par le Président syrien Choukri al-Kouwatli et rapporté par feu l’écrivain français, Benoist Méchin, dans son ouvrage intitulé « UN PRINTEMPS ARABE ».

Un entretien ayant coïncidé avec le jour de l’annonce de la création de la République arabe unie entre l’Égypte et la Syrie. À la question de savoir si le projet de l’union des pays arabes était logique, il avait répondu : « Nos frontières ne sont pas des limites, ce sont des blessures ». Des blessures profondes causées par le scalpel colonial.

Or, le Président Choukri al-Kouwatli est un citoyen syrien de souche turkmène, laquelle a compté quatre présidents syriens.

Et puis il est le seul à avoir reçu le titre de « Premier citoyen arabe ». Tout un chacun peut donc constater l’énorme différence entre le Printemps d’hier et le prétendu printemps d’aujourd’hui.

Je vous prie Monsieur le Président de cesser vos lectures dans le dictionnaire du colonialisme.

S’il pousse à la soumission ceux que vous avez-vous-même qualifiés de corrompus, sachez qu’il y a dans nos pays des hommes et des femmes libres et laïcs qui n’ont aucune considération pour la ségrégation raciale et qui ne pardonnent pas au colonialisme son alliance avec la corruption et les corrompus.

Veuillez recevoir, Monsieur le Président, mes meilleures salutations

Note 1: Many commented that Macron needed Not test himself before meeting the Lebanese maligned sectarian leaders: A few deaths among them would have cleared the path for a significant political change.

Note 2: Macron hurried to visit Lebanon after the devastation of the port of Beirut because he knew the conflagration was done by US/Israel and he wanted to “cool” the climate for a total uprising and the kicking out of the colonial powers embassies

Hassan Hamadé: Écrivain et chercheur libanais
– Membre du Conseil national de l’audiovisuel (CNA)
16/12/2020

Source : Al-Intichar (quotidien libanais)
https://alintichar.com/137725

Traduction de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal

[*] Visite finalement annulée, le Président Macron ayant été testé positif pour la Covid-19, le 17 décembre, au lendemain de la parution de cette lettre ouverte.

Another Open Letter to French President Macron

Deuxième lettre ouverte au Président Macron :
Où est l’image satellite du port de Beyrouth ?

Par Hassan Hamadé : Écrivain et journaliste libanais – Membre du Conseil national de l’audiovisuel (CNA)

1er octobre 2020, par Comité Valmy

Monsieur le Président,

Je souhaite commencer par vous féliciter chaleureusement pour votre franchise. Je n’ai pas été déçu que vous soyez allé directement au cœur du sujet, lequel n’a nul besoin de fioritures pour dissimuler sa vérité, vu que cette vérité est la raison directe ayant fait de vous le gagnant de la mission au Liban. J’entends par là : le problème posé par les armes de la Résistance.

Il ne vous a pas fallu longtemps pour avouer ouvertement cette première moitié de ce qui vous intéresse au Liban ; l’autre moitié se résumant à votre obsession de gagner des contrats s’appropriant ce qui reste de la richesse de l’État et du peuple.

Des richesses passant du port martyr de Beyrouth à son aéroport menacé du même sort, à l’électricité, à l’eau, au téléphone cellulaire, aux infrastructures et, bien sûr, à ce que la terre et les eaux du Liban contiennent de pétrole et de gaz, là où le géant de l’énergie, la société Total, occupe le devant de la scène.

Mis à part ces deux préoccupations majeures, votre discours [1] sur la dimension humanitaire, réformatrice et éthique de votre mission au Liban est resté dans les limites de sa fonction de maquillage et d’un semblant d’élégance.

Ceux qui attendaient le contraire de votre part ont été désagréablement surpris. C’est leur problème car dans le dictionnaire des États, les promesses n’ engagent que ceux qui y croient.

Outre les félicitations, il nous faut discuter ensemble, chacun à partir de son camp, de la question de l’affrontement direct avec les forces qui s’opposent à la campagne coloniale destructrice désignée par « printemps arabe ».

Pour rappel, Monsieur le Président, cette expression avait déjà été utilisée par les gouvernements français il y a 172 ans, lorsqu’ils avaient affirmé que la création de la sinistre mission « Baudicour » [2] serait le début du printemps des peuples. Mission qui consistait à déraciner les maronites libanais de leurs terres et à les transférer en Algérie.

Conformément à votre habitude des raccourcis, votre conférence de presse du 27 septembre 2020 est venue confirmer vos déclarations annoncées quelques heures avant votre deuxième visite au Liban, le 1er septembre 2020.

C’est ainsi que vous avez ajouté une zone d’ombre encore plus dense dans l’espace des relations libano-françaises ; autrement dit, une nouvelle ambiguïté qui s’ajoute aux précédentes déjà évoquées [3] et qui mène à une lecture différente du devenir des relations entre nos deux pays, loin de la propagande entourant le mythe d’amour et de tendresse pour le Liban.

Cette fois, vous nous avez rappelés une époque supposée révolue, étant donné qu’aujourd’hui vous nous apparaissez plutôt proche d’un haut-commissaire.

Cependant, avec moins de pouvoirs que vos prédécesseurs à ce poste, car leur référence était Paris, tandis que votre véritable référence se situe quelque part dans le « Nouveau Monde ».

Cela ne vous est absolument pas étranger. Vous êtes le tenant d’une démarche politique ayant opté pour une France européenne, plutôt que pour une France française et si vous aviez à choisir entre une Europe européenne et une Europe atlantiste, vous opteriez pour une Europe atlantiste.

Et je n’irai pas jusqu’à dire, comme certains, que vous iriez jusqu’à préférer l’appartenance aux États-Unis à l’appartenance à l’Europe atlantiste.

C’est probablement la raison qui fait qu’à aucun moment vous n’avez abordé la question cruciale de la Résistance qui protège autant qu’elle le peut le Liban du monstre raciste sioniste, alors que vous considérez le manque de respect à la mémoire de la Résistance française comme un péché mortel.

En effet, la résistance à l’occupation et la défense des patries est par principe une question morale, éthique, légale et humaine, toute proche de la sainteté.

Trouvez-vous qu’il est sérieux de parler de la nôtre comme vous l’avez fait ? Pour de nombreux Libanais, votre discours sur la Résistance libanaise est venu comme un coup de poignard en plein cœur.

Peut-être que vous ne l’avez pas voulu. Et, peut-être que vous avez écouté plus qu’il ne le faut vos conseillers et vos amis, lesquels n’ont fait que vous impliquer dans un problème pouvant fortement compromettre la relation historique entre nos deux pays dans le présent et le futur.

Monsieur le Président,

Je n’ai pas été surpris par votre totale indifférence à l’analyse du dossier libanais par le respecté homme d’État français [4], Maurice Couve de Murville.

La différence entre vous porte non seulement sur l’époque, l’expérience et la culture, mais aussi sur l’appartenance. Il était dans la fleur de l’âge lorsqu’il a rejoint le Commandant de la France libre, a travaillé à la radio de la Résistance, est resté proche du Général de Gaulle tout au long de sa vie et a été ministre des Affaires étrangères, puis Premier ministre.

Ce qui explique qu’il ait tenu à ne pas prendre parti face aux querelles des Libanais et donc à ne pas les encourager à détruire leur pays.

Naturellement, à l’époque il n’a pas eu à s’opposer à la résistance naissante qui a expulsé les monstres sionistes de la capitale Beyrouth ; première capitale arabe occupée par l’armée israélienne lorsque le Hezbollah n’était pas encore né. Lequel Hezbollah est néanmoins né de la matrice de cette première résistance triomphante qui a brisé les crocs des monstres sionistes et les a expulsés de Beyrouth que vous avez visité et dans les rues duquel vous vous êtes promené.

Vous êtes censé avoir été informé de ces faits historiques avant d’user d’expressions offensantes contre notre Résistance, abstraction faite de votre position de principe en raison de vos engagements otano-sionistes.

C’est là une atteinte à la dignité de la patrie libanaise, laquelle suppose que vous lui présentiez vos excuses.

Vous avez parfaitement le droit de haïr la Résistance et de la combattre, mais vous n’avez pas le droit de l’offenser alors que vous traitez du sujet libanais au titre de l’amitié.

Imaginez la situation inverse où un Libanais se tiendrait devant vous pour traiter de la sorte la Résistance française. Quelle serait votre réaction ? Je m’attends à ce que vous entriez dans une grande colère ; là aussi, abstraction faite de votre propre opinion sur la Résistance française qui ne concerne que vous.

Et que dire de vos propos prétendant que la Résistance libanaise sème la terreur en Syrie ?

Que cela vous plaise ou non, Monsieur le Président, cette Résistance est le fer de lance de la défense territoriale contre le terrorisme, à commencer par les organisations atlantistes de la terreur, c’est-à-dire Daech, le Front al-Nosra, la Brigade Sultan Mourad, la Harakat Nour al-Din al Zenki et l’ensemble de leurs dérivées bénéficiant globalement du parrainage de votre Organisation du traité de l’Atlantique nord [l’OTAN] et du financement puisé dans les caisses des pays du Golfe, occupés par vos armées atlantistes.

Plus de 170 000 terroristes venus d’Europe et d’autres pays, amenés par votre organisation au cœur de la géographie syrienne pour la déchirer de l’intérieur, menant ainsi la plus monstrueuse des campagnes coloniales que l’histoire ait connues au cours de ses différentes époques. Organisations qui « font du bon boulot », comme l’a dit un jour l’un de vos ministres des Affaires étrangères !

C’est pourquoi vous vous en prenez à la résistance libanaise. C’est peut-être aussi parce qu’elle a énormément contribué à la défense de la présence chrétienne sur la sainte terre syrienne pendant que votre alliance atlantique, laquelle excelle dans la flagellation des peuples et la négation de leurs droits humains les plus élémentaires, travaille jour et nuit à effacer les traces du christianisme de la terre palestinienne du premier révolutionnaire humaniste, Jésus-Christ, et les traces du crime commis le 30 septembre 2000 contre l’enfant Mohammed al-Durah [5], son père, ses frères et ses sœurs.

Et c’est plus probablement encore, Monsieur le Président, la raison qui vous pousse à voir une contradiction incompréhensible entre la résistance du Hezbollah à Israël et son droit d’être un parti respecté au Liban.

Imaginez, là aussi, qu’un Libanais vous dise que toute force française ayant résisté aux nazis perdrait son droit à former un parti politique respecté en France. Serait-ce raisonnable ? Question, évidemment indépendante de votre propre opinion sur le fascisme et le nazisme qui ne concerne que vous.

Tout comme le Christ, le peuple du Christ est persécuté. Le pape Benoît XVI n’a-t-il pas condamné « l’hostilité et les préjugés à l’encontre des chrétiens » en Europe » ?

Lisez, Monsieur le président, son message pour la Journée mondiale de la paix du 1er janvier 2011. Cette même année où vous avez inauguré l’orgie sanguinaire via votre printemps arabe. Dans le quatorzième paragraphe de ce terrible message, le penseur Joseph Ratzinger semble considérer que vos discours au monde manquent de sincérité.

Contentez-vous de lire ce seul paragraphe, votre excellence, car il est fort probable que vous ne soyez pas intéressé par ce genre de lecture.

Lors de votre conférence de presse, alors que je vous observais pendant que vous déversiez vos ressentiments, j’ai senti toute la froideur de vos paroles en dépit de la volubilité de votre langage corporel.

Vous êtes apparu froid et nullement concerné par la requête libanaise qui vous a été personnellement adressée ; celle de fournir une image satellite [6] de la terrible explosion terrestre engendrée par le crime complexe contre l’existence même du Liban. Vos paroles resteront creuses et sans valeur tant que vous éluderez notre demande destinée à savoir qui a dirigé l’explosion hirochimienne contre le port de Beyrouth, pour favoriser le port de Haïfa en Palestine occupée.

Nous voulons la vérité ; la vérité pour le Liban. Nous avez-vous entendus, vous qui vous permettez de nous donner des leçons en insultant nos politiciens voleurs, afin de susciter notre amitié et de gagner notre confiance, tout en continuant à vous entendre avec eux et à dissimuler le coupable ? Il en est toujours ainsi : généralisation, hausse du ton, débats creux aboutissant à la dissimulation du coupable. Une technique, cher Président, qui ne trompe que ceux qui croient aux paroles des États. Où sont donc les images satellite ? Et que cache leur non divulgation ?

Désolé, Monsieur le Président, pour avoir oublié que votre éloquence en matière de transparence, de démocratie et de droits humains n’a d’égale que l’éloquence de vos confrères banquiers lorsqu’ils insistent pour que les clients déposent leur argent et leurs économies dans les coffres de leurs banques, pour qu’une opération de sublimation transforment ensuite leurs dépôts en vapeurs lorsque sonnera l’heure du grand pillage et de la destruction des familles, sous couvert de telle ou telle révolution colorée, comme cela s’est passé et se passe encore au Liban. Choses que ne pouvez ignorer, votre Excellence.

Et c’est peut-être parce que vous maitrisez ce savoir que vous avez complètement ignoré les aveux particulièrement terribles, formulés quelques heures avant votre grande conférence de presse, devant le Congrès américain, par le diplomate américain, David Hale ; un homme d’une grande politesse, un amoureux de la paix et de l’harmonie entre les humains au point d’accompagner les orgies sanguinaires au Liban depuis des décennies. Il a déclaré que son administration avait dépensé et distribué dix milliards de dollars [7] au profit de ceux en qui vous avez confiance au Liban : des organisations non gouvernementales et des inféodés fiables au sein des cercles politiques et des médias menteurs.

Des aveux venus s’ajouter aux déclarations antérieures d’un autre diplomate américain, tout aussi féru des orgies sanguinaires au Liban : le nommé Jeffrey Feltman. Lequel avait affirmé le 8 juin 2010, toujours devant le Congrès américain, que son administration pacifique, qui hait les massacres et les assassinats, avait dépensé un demi-milliard de dollars au cœur du Liban afin de défigurer l’image du Hezbollah [8].

Les oreilles de ces individus, Monsieur le Président, entendent essentiellement vos collègues parmi les banquiers internationaux, tandis que leurs yeux sont tournés vers la Banque centrale libanaise qu’ils se préparent à dépouiller de son droit exclusif d’émettre la monnaie. Pour cela, le prétexte est fin prêt : la Banque du Liban n’étant plus digne de confiance, ce privilège doit être confié à des banques privées.

Mais, puisque les banques privées ont également perdu leur crédibilité avec la complicité du gouverneur de la Banque centrale (l’équivalent d’Edgar Hoover en matière de finances) et des sommités du comité des banques, lesquels passent la moitié de leur temps à Paris loin des projecteurs des patriotes libanais, le privilège doit plutôt être confié à des banques internationales.

Et la « Bank of New York », l’une des plus grande banques, propriétaire de la Réserve fédérale américaine, détient désormais 34% des plus grandes banques libanaises, grâce à une opération furtive de vol mi-2019. Une opération que les médias libanais « libres » ont dissimulée, ces mêmes médias financés par les dix milliards de dollars précités et devenus promoteurs de ladite révolution ; la révolution de l’autodestruction au nom de la lutte contre la corruption.

Est-il possible, Monsieur le Président, que vous ignoriez ce vol généralisé de tout un peuple par les banques !? Il est étonnant que vous ayez pu oublier un fait aussi terrible, exactement comme vous semblez avoir oublié les images satellite, lesquelles faciliteraient grandement la désignation des responsables de l’explosion hirochimienne du port de Beyrouth.

Monsieur le Président,

Il m’est difficile de croire ceux qui prétendent que vous n’êtes pas au courant de tout cela, tout comme il m’est difficile de croire que vous ne sachiez pas que vos avions de l’OTAN brûlent systématiquement des champs de céréales et des cultures de terres fertiles en Syrie, pour que les Syriens meurent de famine pendant que le blocus atlantiste les prive des moyens de combattre l’invasion de la pandémie virale.

Vous qui êtes issu du monde civilisé, transparent, défenseur des droits humains, naturellement et avant tout démocrate, vous devez présenter vos excuses aux Libanais, à nous tous, Monsieur le Président. Ce serait honteux de vous en abstenir. Quant à nous :

Notre Liban est et restera à nous, il n’est pas à vendre. Notre Syrie est et restera à nous. Notre Palestine était et reviendra au peuple du Christ… notre peuple.

Une fois de plus, Monsieur le Président, veuillez accepter mes meilleures salutations.

Hassan Hamadé
01/10/2020

Traduction de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal

Source : Al-Intichar (Liban) http://alintichar.com/123852

Notes :

[1][ Conférence de presse du Président Emmanuel Macron sur la situation au Liban. (diffusée en direct le 27 septembre 2020 (vidéo)]
[2][ Le projet Baudicour de 1848]
[3][Première lettre ouverte au Président Macron ; par Hassan Hamadé]
[4] [La crise libanaise et l’évolution du Proche-Orient [Maurice Couve de Murville]
[5][Charles Enderlin & l’affaire Mohammed al-Durah (vidéo)]
[6][Aoun demande à Macron des images aériennes du moment de l’explosion]
[7] [Al-Mayadeen / Hale : nous avons dépensé 10 milliards de dollars pour les forces de sécurité et la société civile libanaises (vidéo)]
[8][Al-Mayadeen / Jeffrey Feltman : Les USA ont dépensé 500 milliards de dollars pour défigurer l’image du Hezbollah (vidéo)]


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